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Editorial | La Nouvelle Action Royaliste

Constat de faillites

Editorial du magazine royaliste N°933 | 
lundi 20 octobre 2008 | Thème: économie
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Depuis la première décade d’octobre, il est certain que ce ne sont pas seulement les sociétés (boursières) de parieurs qui se sont effondrées mais l’idéologie ultra-libérale et toutes les formes de cette « gouvernance » que nous étions bien peu (1) à récuser avant l’été.

Je n’insiste pas sur le premier point : l’ultra-libéralisme a été tué dans son principe par les Anglais et les Américains lorsqu’ils ont décidé de nationaliser des banques en perdition. La réunion du G7, le 10 octobre, a entériné et élargi cette liquidation précipitée de la sacro-sainte concurrence et des automatismes bienfaisants. Certes, Christine Lagarde et ses collègues croient que les établissements mis sous contrôle public seront restitués au marché lorsque la tourmente sera passée. C’est refuser de voir que nous sommes en train de vivre une grande transformation qui ne touchera pas seulement la finance, l’économie et la monnaie.

Ce qui est en train de faire faillite sous nos yeux, c’est toute une conception de la gestion des affaires publiques, nationales et internationales :

Faillite de la « gouvernance » mondiale. Elle était manifeste lors de la réunion du G7, après une semaine de panique boursière : le plan en cinq points annonce des mesures qui sont en cours (sauver les banques de la faillite, leur fournir les liquidités nécessaires, protéger les déposants) et entérine les nationalisations faites ou préparées. Quant à l’obligation faite aux banques de révéler leurs pertes, elle est imposée avec un an de retard !

Faillite de la « gouvernance » européenne. Si tant est qu’on puisse parler d’Europe... Car nous assistons à d’étranges réunions tenues par certains États qui parlent au nom de l’ensemble de l’Union européenne dans un désordre total. Il y eut le 4 octobre une réunion du G4 (les quatre pays européens membres du G7) qui a donné lieu à de fortes déclarations sur la concertation alors que les participants étaient en désaccord profond et s’autorisaient des solutions nationales à la crise bancaire.

Cette réunion du G4 fut qualifiée de « fiasco » par le ministre espagnol de l’Intérieur qui rappela que « l’Europe, c’est 27 pays ». Par la suite, on vit les Anglais relancer l’idée d’un plan de sauvetage européen que la chancelière allemande avait rejeté et que l’Élysée avait piteusement abandonné pour sauver la réunion des Quatre. Ce que n’empêcha pas Christine Lagarde de déclarer qu’elle n’excluait pas « définitivement » la proposition britannique... à nouveau condamnée par Madame Merkel le 11 octobre. On se souvient que les bonnes résolutions du G4 (concertation, réforme de la finance internationale) n’ont pas retardé d’une seconde la catastrophe boursière.

L’Eurogroupe fut donc convoqué dans l’urgence, le 12 octobre. Mais cet organisme ne réunit même pas la moitié des pays-membres de l’Union et s’occupe des questions monétaires (avec une Banque centrale indépendante !) alors que l’ensemble de l’Europe est confronté à une crise financière. Cette incohérence se double d’une illusion puisque l’Eurogroupe n’a pas de pouvoir de décision. Que fait le Conseil européen des ministres de l’économie et des finances ?

Faillite des organes européens supranationaux : les adjurations de Jean-Claude Trichet, contraint le 9 octobre à une baisse du taux directeur de la Banque centrale, ont été sans effet sur les marchés financiers européens le 10 octobre ; la Commission européenne se contente pour sa part d’entériner les plans de nationalisation et les atteintes au principe de concurrence. Dire qu’on voulait graver dans le marbre constitutionnel la « concurrence libre et non faussée » ! A Francfort et à Bruxelles, nous avons affaire à des tigres de papier.

Faillite de la « gouvernance » française. Nous devrions nous réjouir de la réaffirmation du rôle de l’État national, capable d’agir beaucoup plus vite que les lourdes machines européennes et mondiales, mais nous constatons avec angoisse la carence de Nicolas Sarkozy et de ses proches. Ils pourraient entraîner l’Europe continentale sur la voie d’un Tarif extérieur commun, réaliser un programme de nationalisations préventives, mettre en œuvre un plan de relance économique et de progrès social, se préparer à affronter une crise monétaire. Ils pourraient... mais ils n’ont pas de volonté.

Bertrand RENOUVIN

(1) cf. Madeleine Arondel-Rohaut et Philippe Arondel, Gouvernance, une démocratie sans le peuple ? Ellipses, 2007, prix franco : 18 €.