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Editorial | La Nouvelle Action Royaliste

Une ambition dictatoriale

Editorial du magazine royaliste N°1126 | du 4 juillet 2017 au 11 septembre 2017 - Spécial Eté
mardi 11 juillet 2017 | Thème: politique
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Le thème de la « dérive monarchique » des institutions est aussi vieux que la Ve Répu­blique et presque tous nos présidents en ont été accusés. Emmanuel Macron recevant Vla­dimir Poutine à Versailles puis s’adressant au Congrès dans l’Aile du Midi a relancé la machine à clichés. Cette année, la « monarchie présiden­tielle » est plus que jamais associée à l’image de Louis XIV, à l’absolutisme, voire au despotisme. Les usages polémiques des concepts politiques ont l’inconvénient de brouiller les analyses et de masquer les véritables enjeux, stratégiques et pro­grammatiques. Si dérive il y a, il faut tenter d’en saisir la nature et l’ampleur pour bien la com­battre tout en préparant la remise en ordre et la rénovation de nos institutions.
Quant à l’exercice macronien du pouvoir, l’évo­cation de la monarchie absolue est dénuée de toute pertinence. L’absolutisme est un bref mo­ment dans l’histoire de la monarchie capétienne et l’Ancien régime a été abattu en 1789 par des révolutionnaires qui ont institué une représenta­tion nationale sans remettre en question la mo­narchie royale. La première Constitution monar­chique et parlementaire a été un échec mais c’est la monarchie restaurée après la parenthèse impé­riale qui a établi le régime parlementaire selon des principes qui sont au fondement des institu­tions de la Ve République. À la suite d’éminents juristes, nous avons expliqué mille fois que notre régime politique était une monarchie élective – depuis que le président défini par l’article 5 est élu au suffrage universel – et que cette monarchie démocratique est parlementaire puisque le gou­vernement est responsable devant l’Assemblée nationale. À l’opposé du régime politique des États-Unis, notre monarchie présidentielle, dans sa conception gaullienne, s’apparente au modèle monarchique et royal des nations européennes dans lequel le chef de l’État est le symbole de l’uni­té et l’ultime recours en période critique. Royales ou électives, les monarchies européennes sont républicaines dans la mesure où elles respectent la primauté de l’intérêt géné­ral défini par la délibération démocratique.
Ce rappel permet de situer pré­cisément Emmanuel Macron. L’élu du 7 mai n’a rien changé dans le mode de gouvernance établi au début du siècle : il s’est inscrit d’emblée dans le mouvement subversif qui nous a fait passer de la République à l’oligarchie, du gouvernement se­lon la visée de l’intérêt général à la prise en main du pouvoir par une petite minorité chargé de pro­mouvoir un conglomérat d’intérêts privés – en l’occurrence ceux de la classe dominante. Cette oligarchie s’est installée avec le quinquennat et grâce l’euro qui est un mode de direction autori­taire, radicalement antisocial, dont les Grecs font la cruelle expérience. Dès le début de sa carrière, à la banque puis dans le cercle dirigeant, Emmanuel Macron s’est placé dans le système oligarchique dont il a maintenant l’entière maîtrise. Son projet n’est pas le retour à la monarchie parlementaire gaullienne, comme il le laisse parfois entendre, mais l’accélération du processus de domination du pays par l’élite du pouvoir, des affaires et des médias. Maître de l’Assemblée nationale par le biais du parti qu’il a créé, ignorant le principe de séparation des pouvoirs au point de désigner lui-même le président du groupe parlementaire de La République En Marche, décidé à légiférer par voie d’ordonnances, le chef de l’État s’est adressé au Congrès pour montrer à tous qu’il était le maître et que son Premier ministre avait rang de simple secrétaire, chargé de régenter une équipe ministé­rielle encadrée par des directeurs de cabinet aux ordres de l’Élysée. La mise en œuvre d’un « sys­tème des dépouilles » contraire à la conception française de l’État viendra compléter d’ici peu ce dispositif.
L’efficacité du management oligarchique sera peut-être atteinte, mais au prix d’une accélération du processus de destruction de la Ve République. Emmanuel Macron pense et agit au mépris de la fonction arbitrale qui lui est assignée par la Constitution, selon l’ambition dictatoriale que suppose la pleine réalisation de l’ultralibéralisme.
La lutte contre les « réformes » macroniennes n’est pas séparable du projet de restauration et de rénovation des institutions gaulliennes.
Bertrand RENOUVIN