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Oui, ça sent la mort (1). Le système financier s’effondre à une vitesse sidérante, les jours de la zone euro sont comptés, l’avenir des économies européennes est angoissant... Dans cette catastrophe généralisée, le supposé président et son équipe de riches avocats d’affaires démontrent jour après jour leur incapacité. Ils sont disqualifiés. Ils le seront de plus en plus. Je constate une situation, avec froideur. Nous n’avons jamais été obsédés par Nicolas Sarkozy, ni ravagés par la haine d’un personnage qui n’en mérite pas tant. Pour nous, le supposé président n’est que le fondé de pouvoir de l’oligarchie, qui le liquidera sans la moindre pitié si l’ancien maire de Neuilly ne parvient plus à défendre ses intérêts.
C’est avec la même froideur, et seulement pour mémoire, qu’il nous faut noter les petits et grands scandales qui s’accumulent depuis quelques semaines : les dépenses somptuaires de Rama Yade, les cigares de Michel Blanc, les rétro-commissions de Karachi, les accusations qui pèsent sur Éric Woerth dans l’affaire Bettencourt... achèvent de convaincre le peuple français que le pouvoir politique est entre les mains d’une caste de jouisseurs arrogants et malhonnêtes.
Comme un revers ne vient jamais seul, Nicolas Sarkozy va devoir se battre au sein de son propre camp contre Dominique de Villepin qui sera beaucoup plus agressif que Jean-Pierre Chevènement en 2002 car l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac a une revanche à prendre contre celui qui a voulu le détruire.
Mais ce sont là des fronts secondaires. D’autres que nous y sont engagés et mitraillent avec plaisir ces cibles faciles de la sarkozie aux abois. Le cœur de la bataille est ailleurs. C’est l’oligarchie dans son ensemble qui nous fait la guerre et c’est elle qu’il faut détruire, dans son ensemble et sans envisager le moindre compromis. A quoi bon la défaite de Nicolas Sarkozy en 2012 grâce à Dominique de Villepin si Dominique Strauss-Kahn est élu ? Après la petite bourgeoisie affairiste, le patron des criminels du FMI ? Non, merci ! La gauche ultra-libérale doit être éliminée aussi complètement que la droite qui croit encore à l’atlantisme et qui a choisi de s’aligner sur Angela Merkel.
Il y a un « parti allemand » en France, que j’appellerai « parti merkelien » pour ne pas humilier les salariés et les retraités allemands, victimes comme nous de leur « gouvernance » ultra-libérale. Les oligarques de Berlin ont remporté leurs succès douteux et provisoires grâce à la contrainte salariale, à la manipulation fiscale, à une dévaluation masquée de 10% (2). Et voici que Nicolas Sarkozy et le parti merkelien qui va de François Fillon à Martine Aubry acceptent tous les diktats de la chancelière allemande – inspirés par une idéologie dont l’absurdité et la malfaisance ont été cent fois démontrées : le plan d’austérité européen nous conduit de la faible croissance à la récession et risque de nous faire basculer dans la dépression. Il faut dénoncer ce dispositif suicidaire et faire campagne pour une sortie concertée de la zone euro selon les plans établis par les économistes « hétérodoxes ». Il ne faut rien concéder sur la « réforme des retraites » conçue pour apaiser les spéculateurs (3) et calculée comme si nous devions subir dans les vingt ou trente prochaines années la rigueur salariale, le chômage, le plein emploi. Il ne faut rien lâcher parce que le motif de cette réforme est abject et parce que les mensonges qui l’accompagnent sont répugnants : il n’y aura pas de « problème des retraites » dans une société de hauts salaires et de plein emploi, dans une nation ayant relancé son économie grâce à un système continental de protection commerciale et monétaire.
Quant à la réforme de la « gouvernance européenne », elle supposerait une révision du traité de Lisbonne qui demanderait des mois ou des années de négociations et de ratifications alors que nous sommes en train de vivre l’implosion généralisée du système.
La bataille contre l’ultra-libéralisme est presque terminée car il suffit d’achever un système agonisant. C’est le projet de reconstruction qui doit maintenant nous mobiliser.
Bertrand RENOUVIN
(1) cf. l’éditorial du n° 972 « Dans la nasse ».
(2) Cf. l’article de Philippe Cohen publié le 16 juin sur le site http://www.marianne2.fr
(3) Cf. la chronique de Daniel Schneidermann, le « neuf-quinze » : Le cri du cœur anonyme de Bercy, 17 juin 2010.