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Editorial | La Nouvelle Action Royaliste

Dix années de déni

Editorial du magazine royaliste N°1080 | du 2 juin 2015 au 15 juin 2015
samedi 6 juin 2015 | Thème: europe
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Le 29 mai 2005, le peuple français rejetait le pré­tendu « Traité constitutionnel ». Dès le 17 juin de la même année, le Conseil européen amor­çait la procédure du déni qui allait aboutir au traité de Lisbonne signé en 2007 puis ratifié sans consul­tation populaire.

Le déni de 2005 est central dans la transformation de notre République - organisée selon les principes d’une monarchie élective, démocratique et parle­mentaire - en une gouvernance oligarchique.

Ce déni vient après l’adoption en septembre 2000 d’un quinquennat qui assure la rotation rapide des équipes ministérielles sous la direction d’un « pré­sident de la République » agissant comme chef de gouvernement.

Ce déni vient après le passage à l’euro qui aban­donne la politique monétaire à des organes exté­rieurs, hors de tout contrôle démocratique.

Ce déni précède et annonce les textes par lesquels la gouvernance oligarchique se soumet à des obli­gations économiques et financières qui constituent des abandons de souveraineté : six pack, two pack, « semestre européen », traité sur la Stabilité, la Coor­dination et la Gouvernance (TSCG) de 2012.

Ces textes opaques ont été explicités et dénoncés à de multiples reprises mais rien ne vaut l’examen des procédés mis en oeuvre. La Grèce fut le labo­ratoire dans lequel on expérimenta les thérapies ex­trêmes concoctées à Berlin, Francfort, Bruxelles et Washington et les ravages économiques et sociaux qu’elles provoquèrent s’observent, à des degrés di­vers, dans toute l’Europe du Sud. Les effets de ces traitements de choc s’ajoutent aux conséquences, toujours négatives, de la globalisation financière et du libre-échange. Un état de violence généralisée s’est créé.

À chaque étape du processus entamé en 2000, les chefs de la droite et de la gauche ont fait cause com­mune. Jacques Chirac et Lionel Jospin pour le quin­quennat et l’euro. Nicolas Sarkozy, Jacques Chirac et François Hollande pour le «Traité constitutionnel ». Les dirigeants de l’UMP et du Parti socialiste lors de la ratification du traité de Lisbonne et du TSCG de 2012, sous les applaudissements du Patronat et des banques. Telle est bien la définition de l’oligarchie : peu d’hommes exercent le pouvoir à leur profit et pour le service d’intérêts privés.

La négation du référendum de 2005 est cruciale car l’adoption ultérieure du Traité de Lisbonne et du TSCG signifie que l’exercice de la réalité du pouvoir se fait dans l’abandon de la souverai­neté.

Le passage de la République à l’oligarchie - du gouvernement en vue du bien commun à la gestion des intérêts privés - coïncide avec l’abandon de la monnaie qui est par définition un acte du pouvoir souverain, avec l’abandon de notre souveraineté nationale dans les domaines essentiels, avec la néga­tion de la souveraineté populaire qui est au principe de la démocratie. Or la volonté des Français et des Néerlandais exprimée au suffrage universel en 2005 n’a pas été respectée et nous constatons aujourd’hui que le gouvernement allemand, la Banque centrale européenne et la Commission européenne essaient de contraindre le gouvernement grec, légitime et lé­gal, à renoncer à l’ensemble de son programme. Ceci au nom de structures « européennes » qui sont étran­gères à la République, faute d’État susceptible de mettre en oeuvre son principe, et qui sont contraires à la démocratie puisque le principe de séparation des pouvoirs est violé en tous points du dispositif établi par les traités.

La réflexion selon les concepts de la philosophie politique, l’analyse juridique et la simple observa­tion des événements politiques conduisent à la même conclusion : il existe un lien essentiel entre la Répu­blique, la souveraineté de la nation définie comme collectivité historique et juridique, et la souveraineté populaire. Si ce lien se défait, la sécurité nationale, la justice sociale et les libertés publiques, la prospérité collective et le bien-être individuel sont menacés. La question du régime politique - monarchie élective ou royale, régime d’Assemblée… - perd tout sens quand la souveraineté est anéantie.

Tel n’est pas le cas. En France, la souveraineté est délaissée, abandonnée, mais elle peut être ressaisie dans toutes ses exigences selon la Déclaration de 1789, le Préambule de 1958 et la Constitution de 1958. Ce sont les conditions politiques de ce ressai­sissement qui ne sont pas réunies.

Bertrand RENOUVIN