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Editorial | La Nouvelle Action Royaliste

Feu sur le Parlement !

Editorial du magazine royaliste N°1143 | du 17 avril 2018 au 30 avril 2018
mercredi 25 avril 2018 | Thème: politique
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La frénésie réformatrice de l’exécutif ne pouvait pas épargner nos institutions. Le texte présenté par le Premier ministre le 4 avril a d’abord été analysé par la presse comme une réforme plus symbo­lique qu’historique. Pas historique, c’est certain. Pas symbolique, cela reste à voir. Les quotidiens L’Opinion et Le Monde, qui se sont procurés l’avant-projet de loi constitutionnelle transmis en Conseil d’État, n’hésitent pas à affirmer que les droits du Parlement vont être « bri­dés » et « contraints ». Les tenants de la rigueur budgé­taire aiment tailler dans les effectifs. Les parlementaires n’y échapperont pas. Leur nombre sera réduit de 30 %. La nouvelle répartition, a assuré Édouard Philippe, « se ferait dans des conditions qui garantissent la représen­tation de tous les départements et territoires », ce que conteste le président du Sénat, qui bataille par ailleurs ferme contre la limitation du nombre des mandats, éga­lement inscrite dans la réforme. Privilégiant la défense du « bout de gras » des élus, il joue au maquignon avec le gouvernement. Le projet de réforme peut d’ailleurs s’analyser comme un subtil compromis entre la volonté de respecter les engagements du candidat Macron et la nécessité de trouver un accord avec le Sénat pour espé­rer une adoption par le Congrès et éviter le recours à la procédure, toujours périlleuse du référendum.

« La copie doit être améliorée », s’est contenté de décla­rer Gérard Larcher au Figaro. Son opposition devrait pourtant être totale contre un texte qui renforce un peu plus la primauté des députés sur les sénateurs en per­mettant à l’Assemblée nationale de statuer définitive­ment sur la dernière version du texte votée par elle, en cas d’échec de la commission mixte paritaire. Le gouvernement se réserve même le droit de déclarer rece­vables, ou pas, les amendements déposés par le Sénat. C’est l’esprit même du bicaméralisme qui est mis a mal avec ce projet.

Le rôle des députés n’en sort pas pour autant renforcé. Pour s’arroger plus de pouvoirs, le gouvernement veut étendre le champ des textes qu’il peut inscrire prio­ritairement à l’ordre du jour aux « textes relatifs à la politique économique, sociale ou environnementale déclarés prioritaires par le gou­vernement ». Efficacité et rapidité guideront le travail des parlemen­taires qui devront légiférer davan­tage en commissions. Le vote du budget sera réduit de 70 à 50 jours. Le droit d’amendement n’est plus limité comme cela était prévu ini­tialement, mais les amendements devront être en lien direct avec le texte proposé, et de « portée normative ».

Michel Debré avait introduit dans nos institutions le parlementarisme rationalisé. Emmanuel Macron in­vente le parlementarisme ratatiné.

D’autres dispositions du projet de réforme sont en contradiction avec notre modèle républicain de démo­cratie représentative : la possibilité de saisir, par voie de pétition, la Chambre de la participation citoyenne qui remplacerait l’inutile Conseil économique social et en­vironnemental ; la définition large de la responsabilité pénale des ministres qui pourraient être mis en cause pour leur inaction et jugés par des magistrats et non des politiques après la suppression de la Cour de Justice de la République.

L’introduction dans la Constitution de la notion de spé­cificités liées à l’insularité de la Corse, et du « droit à la différentiation » s’inscrivent dans le droit fil des remises en causes de la nation liées à la course à l’échalote eu­ropéenne.

L’introduction d’une dose de proportionnelle ne mettra certes pas en cause la stabilité de nos institutions. Mais ce n’est pas avec ce cache-sexe qu’on rétablira une vraie représentation de nos concitoyens, ce que permet­trait, sans nuire à la stabilité des institutions, l’élection d’un Sénat au scrutin proportionnel.

La réaffirmation de la responsabilité gouvernementale donnerait pour sa part aux élus le pouvoir d’exercer pleinement leur rôle de représentants de la nation. Nos institutions n’ont pas besoin d’être réformées pour don­ner les mains libres à un gouvernement poursuivant un projet européiste et libéral contraire aux aspirations et aux intérêts du peuple français. Elles ont besoin d’être rétablies dans leur esprit tel qu’il a été défini en 1958 et en 1962.

Laurent LAGADEC