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Editorial | La Nouvelle Action Royaliste

L'Appel de Manille

Editorial du magazine royaliste N°1074 | du 12 mars 2015 au 25 mars 2015
vendredi 20 mars 2015 | Thème: environnement
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Passons sur le volet pipole, puisque rien de sérieux en politique ne se fait plus sans y impliquer un acteur de cinéma.

Passons aussi sur les subtiles spéculations électorales que les experts décortiquent avec délice : il faut bien que les élections aient lieu, et les accords entre socialistes et écologistes font partie du jeu.

Passons même sur l’appât un peu usé des créations d’emplois hypo­thétiques et du bizness juteux, puisque le succès diplomatique ne se mesure plus qu’à l’aune des contrats signés. Mais une fois re­tirées toutes les paillettes de ces « coups médiatiques », qui sont souvent les seuls qui intéressent vraiment les analystes pontifiants de nos écrans et de nos journaux il faut se poser la seule question qui vaille : que doit-on penser de l’Ap­pel de Manille.

La première bonne nouvelle, c’est que la méthode est bien celle qu’il fallait appliquer. L’idée de s’associer avec les Philippines pour demander à la communauté inter­nationale de se mobiliser pour agir enfin face au changement clima­tique est excellente. Il était impé­ratif de s’associer avec un pays en développement, un pays de surcroît parmi les plus affectés par les bou­leversements du climat, pour que cette déclaration fût crédible.

Voilà qui libère en effet la parole de la France et l’exonère des soup­çons réciproques entre pays déve­loppés, accusés non sans raison de prétexter du climat pour poursuivre leurs politiques prédatrices, et pays émergents ou en développement qui font souvent preuve d’égoïsme sacré sur le thème : payez, ou lais­sez-nous d’abord achever notre développement. Grâce à cet Appel commun, les deux associés peuvent parler haut et clair.

L’autre bonne nouvelle, c’est la reconnaissance enfin officielle du sérieux des travaux du GIEC, (1) de la réalité et de l’ampleur du changement climatique, et de l’ur­gence absolue d’agir tant qu’il en est encore temps. Ce n’est pas rien.

Par ailleurs, les discours de Fran­çois Hollande, depuis que la France est en charge de la Conférence des Nations-Unies sur les changements climatiques (COP21), laissent es­pérer qu’il a pris toute la mesure des conséquences du réchauffe­ment climatique, et qu’il est sincère quand il déclare urgent « d’agir pour que [nos] enfants, [nos] pe­tits-enfants puissent tout simple­ment vivre sur cette planète. » (2)

Mais cela dit, quelle pauvreté dans cet appel ! Qui a bien pu produire un texte aussi plat ? Une liste de déclarations molles, un appel non contraignant aux bonnes volontés des pays, aucun engagement fort, ni promis ni demandé, dans les dix paragraphes de la déclaration (3) : l’objectif semble plus de préparer à l’avance l’opinion publique à un échec de la COP21 en décembre prochain, que de lancer une grande action internationale. Curieuse incohérence, entre des discours musclés et une action dans laquelle notre pays semble hésiter à s’enga­ger vraiment.

Cette timidité désolante laisse mal augurer du succès du sommet de Paris, ce qui serait d’autant plus triste que tout est en place pour lan­cer enfin le grand chantier dont le monde a besoin de toute urgence, et que c’est dans ces situations que la France, historiquement, donne toute sa mesure.

On nous rebat les oreilles depuis un mois de l’exemple, visiblement mal compris, de « l’esprit du 11 janvier ». Cette levée en masse des Français autour des principes qui les rassemblent, et qui n’a rien à voir avec une quelconque unité idéologique, montre sans équi­voque que lorsque la cause en vaut la peine, ils sont, peut-être plus que les autres peuples, capables d’ou­blier leurs égoïsmes et leurs diver­gences pour faire corps et donner l’exemple de ce que l’on peut et doit faire.

« Fraternité », dans notre devise, n’est pas toujours un vain mot. C’est la vocation historique de notre pays, que de lancer de telles initiatives et de se dépasser au nom de l’humanité toute entière. Mais pour cela, encore faut-il que l’ef­fort soit compris et la décision sans équivoque.

Alors, Monsieur Hollande, quittez votre costume de Gentil Organisa­teur, agissez en chef d’État, mettez-y vos tripes et prenez des risques : n’ayez pas peur, si vous leur prou­vez que vous y croyez vraiment, les Français vous suivront.

François VILLEMONTEIX

(1) Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.

(2) Le Monde, 26 février 2015.

(3) http://www.elysee.fr/declarations/article/appel-de-manille-a-l-action-pour-le-climat/