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Editorial | La Nouvelle Action Royaliste

Vérités sur les banlieues

Editorial du magazine royaliste N°1064 | du 24 octobre 2014 au 7 novembre 2014
mercredi 29 octobre 2014 | Thème: politique
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Vérités sur les banlieues

Bien des romans dévoilent une réalité sociale aussi bien ou mieux qu’une enquête menée dans une intention scientifique. En voici un (1), remarquable, qui figure­ra plus tard dans les documents majeurs sur notre société car il sera conforté par maints rapports officiels qui dorment en ce mo­ment au fond des tiroirs.

L’auteur, Olivier Norek, est lieutenant de police judiciaire en Seine-Saint-Denis. Il aurait pu écrire un essai ou un pamphlet pour dénoncer ce qu’il a vu et compris mais il aurait succombé avec son éditeur sous les procès en diffamation. Cette menace planait aussi sur un roman poli­cier qui se serait déroulé dans une ville connue de la banlieue parisienne. Ce sont donc des lieux et des personnages imagi­naires qu’il décrit avec talent. Imaginaires mais plausibles et somme toute très proches de per­sonnages qu’Olivier Norek a ren­contrés en faisant son métier ou en s’informant auprès de diverses personnalités politiques (2) qui, en privé, livrent des analyses d’un parfait cynisme comme j’ai pu le constater à maintes reprises depuis une trentaine d’années.

L’histoire est celle du maire d’une ville de banlieue qui dé­cide de provoquer une émeute pour répondre à une pressante demande de « remboursement » venant d’un caïd. L’argent en­voyé par le gouvernement pour rétablir le calme sera partagé entre les dealers et le maire qui financera ainsi la campagne pour sa réélection. Des élus consultés par l’auteur n’avaient jamais eu vent d’opérations de ce genre, qu’ils jugeaient cependant vrai­semblables. Mais tous les autres faits et propos rapportés dans Territoires sont véridiques.

Il est vrai que des maires, avec la complicité de ministres de droite et de gauche, achètent la paix sociale dans leur commune en laissant se développer le com­merce de la drogue parce que le deal fait vivre les quartiers pauvres et parce que les dealers veulent, comme tous les com­merçants, des rues et des cités tranquilles.

Il est vrai que des voyous répertoriés se trouvent dans maintes structures municipales, voire dans l’entourage de mi­nistres ou de chefs d’État (3), et que certains maires se servent d’eux pour acheter des voix.

Il est vrai que certains maires se réjouissent en privé des taux d’abstention qu’ils déplorent en public. Comme le disait un élu à Olivier Norek : « Mon intérêt à moi, politiquement, c’est de dégoûter les gens de la politique pour qu’ils ne s’y intéressent pas et que je conserve un fort taux d’abstention » car il est plus fa­cile d’influer sur un scrutin à 12 000 votants que sur un scrutin à 80 000.

De ces vérités accablantes, plu­sieurs conclusions politiques peuvent être tirées :

Le mythe du « pays réel » en prend un sacré coup : les collec­tivités décentralisées sont aussi corrompues que les autorités politiques nationales mais autre­ment et de manière moins visible.

Les nationalistes xénophobes se trompent et nous trompent en dé­signant à la vindicte populaire des groupes « ethniques » relégués dans les « quartiers difficiles ». Des quartiers et des régions sont abandonnés à l’exploitation po­litico-mafieuse parce que les élites ne croient plus au déve­loppement économique et à la politique du bien-être généralisé.

La réflexion ne doit pas se faire contre les élus locaux – la plu­part sont honnêtes – mais sur les tâches qui devront être assi­gnées, avec les moyens néces­saires, au ministère de la Justice et au ministère de l’Intérieur après la défaite de l’oligarchie. Au lieu de monter en spectacle la répression contre la petite dé­linquance qu’on laisse prospérer dans les « quartiers difficiles », il faudra réprimer les complices politiques du crime organisé aussi durement que les organisa­tions criminelles.

Pour l’heure, il faut se soucier des tâches imbéciles et inutile­ment dangereuses qui sont assi­gnées à maints fonctionnaires de police mal équipés mais lucides et exaspérés. Le ministre de l’In­térieur – comment s’appelle-t-il, déjà ? – ferait bien de s’inquié­ter.

Bertrand RENOUVIN

(1) Olivier Norek – « Territoires », Éd. Michel Lafon, 400 pages, oct. 2014, prix public : 18,95 €.

(2) Cf. dans Marianne l’entretien d’Olivier Norek avec Mathias Destal, http://www.marianne.net/Comment-les-maires-du-93-tiennent-leurs-villes_a241886.html

(3) Cf. Pierre Péan – « La République des mallettes, Enquête sur la principauté fran­çaise de non-droit », Fayard, 484 pages, sept. 2011, prix public : 23,40 €.