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Selon un sondage BVA récemment publié, près de 40 % des Français estiment qu’un monarque serait bénéfique pour l’unité nationale. Cette bonne nouvelle doit être accueillie avec une extrême prudence.
Nous ne construisons pas nos analyses politiques sur les sondages, même lorsqu’ils sont favorables aux idées que nous défendons. Nous ne ferons pas d’exception pour le sondage de BVA. Il est bien sûr agréable de lire que de très nombreux Français envisagent favorablement l’hypothèse monarchique et nous pouvons en discerner les raisons.
Dans notre pays ébranlé par la crise du politique, il n’est pas étonnant que les regards se tournent vers les monarchies européennes où l’on voit des rois et reines garantir effectivement l’unité, symboliser l’identité collective, incarner l’histoire nationale sans qu’il soit besoin de slogans et de motions de congrès. Dans un entretien accordé au Figaro, (1) le professeur Frédéric Rouvillois a fort bien expliqué les raisons de cette préférence pour la monarchie, qui n’est pas une nostalgie au sens passéiste du terme. (2) C’est là une bonne nouvelle, qui doit être accueillie sans triomphalisme car aucun sondage ne fera disparaître les obstacles à une réinstauration de la monarchie royale en France.
Prenons l’hypothèse la plus favorable, celle d’un choix pour la monarchie royale qui se situerait dans le prolongement de la monarchie élective gaullienne. C’est un choix pertinent, conforme à l’esprit de la Constitution de la Ve République que nous avons explicité à d’innombrables reprises. Pour que ce choix devienne effectivement envisageable, il faut qu’un prince français se présente hic et nunc en recours pour la nation et rende possible, par son action, la tenue d’un référendum sur la révision de la Constitution - une loi de succession remplaçant l’élection au suffrage universel afin qu’il y ait un arbitre permanent au service de la République (la Déclaration de 1789, le Préambule de 1946), de la démocratie (la souveraineté populaire) et du régime parlementaire.
Nous n’en sommes pas là. Parce qu’il y a déficit d’incarnation, pour dire les choses poliment. Mais aussi parce que divers groupes réputés « légitimistes » ou « orléanistes » récusent le modèle de monarchie démocratique et parlementaire qui existe en Europe. Les uns, qui multiplient les capucinades autour d’un roi d’opérette, rêvent d’une monarchie contre-révolutionnaire qui ferait partir toute seule les Chassepots, Kalachnikov et Famas… D’autres propagent l’idéologie antirépublicaine et antidémocratique qui conduisit leurs maîtres à encenser Pétain, Salazar et Franco. Les uns et les autres s’ingénient à donner de la monarchie la caricature ridicule ou odieuse qui conforte les adversaires de la royauté.
Yves LANDEVENNEC
(1)http://premium.lefigaro.fr/vox/politique/2016/09/02/31001-20160902ARTFIG00331-frederic-rouvillois-pourquoi-les-francais-sont-nostalgiques-de-la-monarchie.php
(2) Nous présenterons prochainement le numéro d’octobre 2016 de la Revue des deux mondes consacré à « La nostalgie du roi ».